RÉFLEXION AU SUJET DE NOTRE-DAME

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Hum, je suis perplexe, comme dirait ma merveilleuse amie Corine Dossa dans ses posts Facebook.

Çà et là sur les réseaux sociaux, je vois des gens s’indigner devant le fait qu’en un claquement de doigts, des fonds considérables aient été libérés pour reconstruire Notre-Dame, alors qu’aucun centime n’est trouvé pour éviter la détresse ou la faim des misérables (au sens hugolien) de ce monde. J’observe cela, perplexe. Mais, entendons-nous, ma perplexité ne naît pas de leur indignation, que je comprends voire partage, elle naît du fait qu’ils ont l’air de découvrir que notre civilisation fonctionne ainsi.

Versailles s’est bâti sur le sang de ses ouvriers, Notre-Dame aussi (ouvriers qui devaient certainement crever la dalle par ailleurs). Et tout cela au nom de quoi ? Du prestige de la France et de la gloire de dieu (raisons balèzes s’il en est). Il est certain que lorsqu’on regarde Versailles (que je suis la première à admirer), la tour Eiffel (que j’adore), Notre-Dame (que je vénère de tout mon cœur) ou n’importe quelle cathédrale, n’importe quel château, n’importe quel monument patrimonial, on ne voit que les symboles culturels et historiques qu’ils représentent, et on oublie que l’argent mis pour leur construction ne fut pas mis au service du peuple, on oublie que leur beauté éternelle s’est créée sur la sueur de travailleurs très certainement sous-payés, aux vies dénuées, elles, de beauté et de gloire.

Mais le fait est qu’une France amputée de ces symboles serait une France moins empanachée, moins caractéristique, moins millénaire, moins solaire.

Alors oui, pour reconstruire Notre-Dame sont miraculeusement trouvés des millions qui jamais n’ont été trouvés pour résoudre la misère des gilets jaunes, des sans-abris, des crève-la-faim, des Fantine et des Gavroche de France. Est-ce juste ? Non, pas trop. Est-ce nouveau ? Non, pas du tout. Cela doit-il changer ? Assurément. Cela peut-il changer ? Hum, me revoilà perplexe…

Car je crois que la nature humaine est ainsi faite. Elle veille à sa postérité au détriment du présent, elle est plus soucieuse d’image et de lustre, de divertissement et de profit, que de solidarité et d’authenticité. Oui nous préférons (quand je dis nous, je veux dire ceux qui ont l’argent) dépenser des millions dans un blockbuster ou sur un joueur de foot ou pour rénover une cathédrale que pour sauver des vies ou éradiquer la misère.

Pourquoi cela ? Je tente une hypothèse. Parce qu’au fond, l’homme est une matière première renouvelable à l’infini, à courte durée de vie, donc jetable et recyclable. Ceux qui meurent sont remplacés par ceux qui naissent. Investir sur l’homme, c’est par conséquent investir sur de l’éphémère, du friable. Tandis qu’investir sur Notre-Dame, c’est investir pour des siècles, c’est voir son nom inscrit en lettres d’or sur plaque de marbre ex-voto au frontispice du monument ! C’est entrer dans l’immortalité !

Notre monde fonctionne comme ça. Depuis des siècles et des siècles. Et si nous n’avons pas trouvé moyen, depuis l’aube de l’humanité, de fonctionner autrement, c’est peut-être que nous n’y arriverons jamais. (Ou alors que le cheminement d’évolution spirituelle de l’homme est d’une lenteur géologique !)

En attendant, je retournerai admirer Versailles, et je retournerai (je l’espère) vénérer Notre-Dame. Forcément. Parce qu’ils font partie de ma culture et de mon histoire. J’oublierai toutes les misères qu’ils peuvent cacher le temps de ma contemplation. Et je tenterai d’améliorer mes propres contradictions individuelles afin de mieux comprendre celles des hommes…

Je t’embrasse.

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